Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
26 mars 2008 3 26 /03 /mars /2008 17:50


Bafouille-image.jpg

C’est à Danielle Akakpo qu’il revient aujourd’hui de présider le bar pour "Le printemps de Calipso". Elle nous propose un poème bien connu, juste un peu réécrit…

 

 

Réfléchis, ma beauté, ça déboule à toute allure le temps des quatre-vingt berges et plus, des rhumatismes, de la canne, du sonotone. Ce temps où tu trembloteras, effondrée dans ton fauteuil, une couverture de laine sur les genoux, un châle à carreaux sur les épaules. Je sais de quoi je cause, à force de rendre visite à ma grand-mère. Un calvaire d’ailleurs, ces visites ! Elle n’arrête pas de parler de ses vingt ans, mémé, elle n’arrête pas de se plaindre, de regretter ses boucles blondes, ses joues lisses, sa taille de guêpe, et le bel étranger qui voulait lui faire connaître le monde. Toi aussi, tu veux finir comme elle, avec des regrets, de l’amertume plein le cœur ?

Tu es mon soleil, mon étoile, je suis fou de toi, je t’idolâtre à en crever. Je te le serine chaque jour, je le claironne à la cantonade ! Ta mère, ta sœur, tes copines, tes collègues, tout le monde te répète que je suis celui qu’il te faut, que tu auras du mal à en trouver un qui t’aime à ce point, qui te couvre de fleurs, de compliments, de cadeaux !

Et toi, tu tergiverses, tu me fais languir, tu m’accordes un baiser, tu m’autorises une caresse. Tu le sais bien que je veux plus, que je te veux toute à moi, que je te désire, là, le mot est dit ! Alors, qu’est-ce que tu attends ? Le bonheur, ça ne t’intéresse pas ? Décide-toi, bon sang ! Parce qu’en dépit de l’adoration que je te porte, je sens que je vais finir par me lasser. Ce n’est pas une vie que tu me fais mener… et je ne suis pas de bois !

Allez, ma beauté, colle tes hésitations dans ta poche avec ton mouchoir dessus, et précipite-toi dans mes bras, dans mon lit ! Les draps t’espèrent, eux aussi, tout aussi impatiemment que moi. Mais ma foi, si tu préfères finir racornie, desséchée, ton bol de tisane à portée de main, à compter tes derniers cheveux blancs, tes dernières dents, à chevroter, blottie contre ton radiateur électrique : " Si j’avais su, si j’avais su ", c’est ton problème, ma chérie !

 




 

Partager cet article
Repost0

commentaires

P
Désolé Jean-Paul, la boîte à Googleter n'en dit pas plus.SKP On n'y échappe pas !
Répondre
J
"s'excuser" ? C'est vague... De lui avoir fait quoi ? de ne pas lui avoir fait quoi ?
Répondre
P
Merci à tous pour vos contributions éclairées. Pour celles et ceux qui se délectent autant de poésie et de bel amour, je vous invite à aider cet internaute qui est arrivé dernièrement au café avec cette question : Comment rédiger un poème pour s'excuser auprès de sa petite amie ?
Répondre
J
En effet, Magali, ce cher Ronsard a consacré beaucoup d'énergie à récrire sans cesse le même poème. En ajoutant des strophes et des images de plus en plus réalistes car, le temps passant, il lui était de plus en plus difficile de persuader les belles de vite profiter du présent entre ses bras et ses draps sans s'entendre répondre (osons l'anachronisme en faisant un emprunt à Corneille et à Brassens réunis) : "Mon vieux Ronsard, j'ai 27 (?) ans et je t'emmerde en attendant". Pour moi, son plus beau (sans doute le dernier sur ce thème), son plus pathétique  aussi est "Quand au temple..." je le recopierais volontiers s'il n'était pas aussi long...En tout cas, du strict point de vue de la drague, la recette doit être bonne car elle a été reprise : pensons à "Si tu t'imagines, fillette, fillette..." de Queneau, imaginons aussi tous ces dragueurs-poètes anonymes qui ont eu recours à cet argument pour vaincre les dernières réticences de beautés qui se croyaient éternelles...
Répondre
M
1 Quand vous serez bien vieille, au soir à la chandelle, Assise auprès du feu, dévidant et filant, Direz chantant mes vers, en vous émerveillant : « Ronsard me célébrait du temps que j'étais belle. »<br /> 5 Lors vous n'aurez servante oyant telle nouvelle, Déjà sous le labeur à demi sommeillant, Qui au bruit de Ronsard ne s'aille réveillant, Bénissant votre nom de louange immortelle.<br /> Je serai sous la terre, et fantôme sans os 10 Par les ombres myrteux je prendrai mon repos ; Vous serez au foyer une vieille accroupie,<br /> Regrettant mon amour et votre fier dédain. Vivez, si m'en croyez, n'attendez à demain : Cueilllez dès aujourd'hui les roses de la viec.<br /> Et aussi:<br /> Mignonne, allons voir si la rose Qui ce matin avoit desclose Sa robe de pourpre au Soleil, A point perdu ceste vesprée Les plis de sa robe pourprée, Et son teint au vostre pareil. Las ! voyez comme en peu d'espace, Mignonne, elle a dessus la place Las ! las ses beautez laissé cheoir ! Ô vrayment marastre Nature, Puis qu'une telle fleur ne dure Que du matin jusques au soir ! Donc, si vous me croyez, mignonne, Tandis que vostre âge fleuronne En sa plus verte nouveauté, Cueillez, cueillez vostre jeunesse : Comme à ceste fleur la vieillesse Fera ternir vostre beauté.Pierre de RonsardJolie variation sur le Carpe diem, Danielle! et merci de ce rappel salutaire. Allez,je file vite cueillir ma journée!
Répondre