De sa virée en ville, il n'a gardé aucun souvenirs et personne ne peut témoigner de son passage. Il a pris des photos, c'est vrai, mais de retour à l'hôtel, quand il les regarde, couché dans l'ombre des siècles, il se dit qu'il reconnait de moins en moins la géographie du monde. Certes, il en perçoit encore les contours et quelques détails capturés par l'objectif lui rappellent des choses anciennes mais il sent bien que ça lui échappe, que cela ne l'aide en rien à établir un certificat de présence, tout juste une contingence. Il lui semble être toujours là où il n'est pas vraiment, un objet flottant dans une zébrure du temps.Il aimerait pourtant avoir l'air de celui qui se souvient de quelque chose de vraiment palpable mais hélas il ne sait pas comment cela se compose un air et puis il risquerait de se perdre dans les brumes du passé et on le regarderait avec une indifférence plus pesante que jamais. Malgré l'heure tardive, la ville est éclairée comme en plein jour et il voit venir le moment où il lui faudra sortir à nouveau, errer dans les environs, masquer son embarras et photographier une fois encore ces milliers de choses irremplaçables qui ne font que passer.