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27 septembre 2007 4 27 /09 /septembre /2007 21:37

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Les dix nouvelles primées pour l’édition 2007 du concours Calipso " Sens dessus dessous " sont :

 

1- Françoise Bouchet pour Madame est morte

2- André Fanet pour Les dessous de l’histoire

3- Guy Vieilfault pour L’Eldorado des antipodes

4- Carole Menahem-Lilin pour Sens dessus dessous

4- Claire De Viron pour Garde à vue

6- Marie Catherine Daniel pour Le rêve de la terre

7- Françoise Guérin pour L’apocalypse selon Sainte Magali

7- Alain Emery pour Safari

9- Emmanuel Renart pour Bar du commerce

10- Sylvette Heurtel pour Le fil

 

merci à tous

et rendez-vous pour le dernier acte

samedi 13 octobre 2007 au Fontanil

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25 septembre 2007 2 25 /09 /septembre /2007 14:00


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En attendant « le verdict du jury » pour le concours Calipso 2007 « Sens dessus dessous », je vous propose un petit jeu de pronostic : à partir des premières lignes des nouvelles en lice vous mettez votre sens de l’intuition au travail pour apprécier au mieux le classement final, et ce avant jeudi 27 septembre à 21h - le recueil à paraître en décembre sera offert au lecteur le plus proche du résultat. 
 
1 - Tout avait commencé par un cri. Le sien, lorsqu’il avait quitté l’océan maternel. C’était la première déchirure, qui ne se réparerait jamais vraiment. Il était là par hasard, sans qu’on l’ait voulu et on le lui avait fait connaître. Dès lors, il avait appris à se suffire à lui-même. Jusqu’à Katia. Et encore… (L’Eldorado des antipodes)
2 - Quand je suis rentré de la fac, Maman avait déjà mis la table. Il était à peine 18h30. Ma gorge s’est brutalement serrée. J’ai embrassé ma mère avec un sourire un peu crispé mais, le temps que j’aille déposer mes affaires dans ma chambre, j’avais retrouvé ma voix. (Le rêve de la terre)
3 - On s’est plu au premier regard, elle et moi. Quelque chose comme une correspondance. Et dès l’instant où je l’ai vue débarquer devant mon rayon, blonde, sportive, jolie, tout ce que j’aime, j’ai su que c’était pour moi. De fait. Un geste, un seul, une main qui se tend, j’étais pris et, de caisse en escalator, de métro en ascenseur, sous le feu de je ne sais quelle urgence, je me suis retrouvé dans sa salle de bains à l’attendre, piqué sur le tabouret de bois blanc. (Les dessous de l’histoire) 
4 - 28 janvier 2007, ce matin, Madame est morte… 139 ans à quelques mois près ! Voici que la vie bien rangée de Louise bascule d’un coup, la voilà toute retournée. Elle observe Madame, les bras ballants. Aucun doute, Madame Maria est morte dans son sommeil, comme ça, pendant la nuit, de la plus belle des morts… celle qui vous emporte sans le dire… sans même vous réveiller… avec la plus respectueuse des discrétions. Madame est morte… confortablement riche et âgée. (Madame est morte)
5 - Ils étaient assis de part et d’autre du bureau de la police côtière. Le ciel s’était assombri sur l’île, la densité de l’humidité rendait l’ambiance pesante. L’homme interrogé, auteur supposé d’un drame provoqué un soir d’été pour avoir pris le bac plutôt que le ferry, alignait mentalement une suite de mots : histoire, histologie, historien, histrion… façon unique de cacher son trouble et de ne pas se départir de son silence. (Garde à vue)
6 - Bizarre ce fil, accroché ça et là entre ronces et touffes d’ajonc poussant sur la lande, il la précède parmi les fougères plus hautes qu’elle. (Le fil)
7 - Ma mission de client de bar s’achève aujourd’hui. Son succès est somme toute relatif. Mais qu’une telle mission ait pu exister est déjà une victoire en soi. (Bar du commerce)
8 - Le coup de fil de sœur Edwige survint alors que nous étions à table. A l’expression de mon père, je compris qu’elle avait choisi de ne rien lui cacher de mes dernières bêtises et lorsqu’il raccrocha, meurtri, je ne pus soutenir son regard. (L’apocalypse selon Sainte Magali)
9 - Edwige, très chère Edwige,
Je crois que Dieu ne devrait plus tarder à reconnaître mes talents de photographe. Mes derniers clichés en attestent, je marche dans l’empreinte des géants. Je foule les sentiers battus par les plus grands. La voie royale est grande ouverte… (Safari)
10 - Il y avait longtemps qu’ils entraient dans le sommeil ensemble – elle dessous, lui dessus. Longtemps qu’ils connaissaient le bruit de soupir que provoquait le corps de l’autre quand il se retournait, et qu’ils avaient appris à distinguer, au grincement énervé du sommier, les réveils, les rêves agités, les désirs tus… (Sens dessus dessous CM06)
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22 septembre 2007 6 22 /09 /septembre /2007 13:32

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C’est un fait, il faut se rendre à l’évidence, Stéphane Laurent est de retour. Sans doute n’a-t-il mis que quelques points de suspension à son œuvre journalistique, peut-être ne fait-il qu’éprouver et nous éprouver sur l’incontournable question du manque, peut-être n’est-ce qu’une conversation passagère, qu’un furieux picotement des neurones et des sens, qu’un clin d’œil dans la lumière noire du jour, toujours est-il que sa méchante humeur, sa mauvaise foi, ses coups de gueule sont tout à fait profitables.  

Bref, c’est une bonne nouvelle.

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20 septembre 2007 4 20 /09 /septembre /2007 21:13

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Les dix nouvelles sélectionnées pour l’édition 2007 du concours Calipso " Sens dessus dessous " sont (en désordre bien sûr) :

L’Eldorado des antipodes

Le rêve de la terre

Les dessous de l’histoire

Madame est morte

Garde à vue

Le fil

Bar du commerce

L’apocalypse selon Sainte Magali

Safari

Sens dessus dessous (code CM06)

 

Un grand merci à tout les participants et rendez-vous jeudi 27 septembre pour le palmarès final.


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18 septembre 2007 2 18 /09 /septembre /2007 22:08


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Cent douze nouvelles. Plusieurs jours de plongée dans une matière opaque, translucide, instable, des heures d’immersion dans une langue singulière, incisive, paresseuse, métaphorique, des matinées et des soirées imprégnées d’une écriture furieuse, délicate, charnelle, chargée de tous les maux de la vie, de toutes les résonances d’une pensée en action, de la rumeur cinglante des sens en alerte. De quoi se souvient-on après cela ? L’histoire n’est pas tout. Des personnages hésitent, frémissent, jouissent, se résignent à l’oubli. Des images glissent lentement dans l’ombre. Les lieux de l’imaginaire ne sont plus hantés par notre présence. Alors de quoi est vêtue la mémoire ? De l'étrange saveur  d’un mot ? D’une phrase témoignant d’une concordance particulière à notre sensibilité ? D’un lieu fictif qui apporte la preuve d’une existence réelle de nos désirs ? D’une intimité dévoilée que nous accueillons secrètement comme nôtre ? Ou bien seulement d’un peu d’embarras, de l’agacement, de la nervosité ? Lecture fastidieuse ou envoûtante, moments de grâce, d’ennui ou de tourment, une chose est sûre certains textes feront date, acquerront cette mystérieuse capacité à durer, et d’autres pas. Cela ne tombe pas forcément sous le sens.

Les dix nouvelles sélectionnées pour l’édition 2007 du concours Calipso " Sens dessus dessous " seront annoncées jeudi 20 septembre aux alentours de 21h.

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16 septembre 2007 7 16 /09 /septembre /2007 18:23

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Les aventures de Scipion Lafleur sont publiées en alternance sur Mot compte double et Calipso. Retrouvez les précédents épisodes publiés ici même : 1 En eau trouble, 3 Emménagement, 5 Pop corn, 7 Bonnes ondes, 9 Tant qu’il y aura des pommes, 11 Bonjour galère

Episode 13
par Désirée Boillot

 

Lorsque le jour commençait à poindre, Scipion secouait l’insomnie en passant sous une douche dont la température s’entêtait à ne pas dépasser celle des eaux de Mourmansk, enfilait sa salopette et descendait l’escalier sur la rampe, en priant pour que sa mise à pied ne fût pas dans la boîte aux lettres. Il accueillait joyeusement les sympathiques factures. Les innocentes relances pour impayés. Les bath publicités pour Huildor, l’huile d’olive extra vierge pressée à l’ancienne, (six bouteilles, un tube de tapenade offert, douze bouteilles, un pot d’anchoïade offert, cent quarante-quatre bouteilles et vous raflez le best-seller " Vieilles recettes de chez nous " de Désirée Voudeul-Ayaulit). Saluait les chouettes propositions de crédit revolving de Cofigaga, embrassait la gardienne et partait en direction de la Seine.

Aucune lettre ne portant le cachet de la banlieue sud, il s’accrochait à l’espoir insensé d’un revirement du proviseur. Après tout, même si Norbert Grimbert faisait partie de la famille surpeuplée des Gueulards affligés de colères violentes, il était aussi un être humain. Qu’on le veuille ou non. Avec des sentiments. Des remords. Des élans de générosité. Des mouvements d’âme et des cors aux pieds. Peut-être avait-il réfléchi. Peut-être avait-il passé l’éponge. Après tout, pourquoi ne pas y croire ? Pourquoi, par un glorieux matin d’été, juché au sommet d’une échelle, ne pas s’imaginer un instant dans la peau de l’agent 007 tenant à Lola des discours de bravoure dans une veste élégante à double boutonnage et pochette de soie ? C’est une période difficile mon amour, mais l’horizon est proche et mon nom est Lafleur. Scipion Lafleur. Gold Lafleur. Le pion qui t’aimait. L’homme au pistolet de peint…

Vous soliloquez ? s’enquit la comtesse qui rentrait de promenade avec ses disciples poilus.

La tête encore pleine des résonances du générique de Monty Norman*, Scipion en lâcha son pinceau qui alla s’aplatir sur un chihuahua, déclenchant une salve d’aboiements franchement casse-figue.

Quelle panade, pensa Scipion tout en amorçant sa descente de l’échelle. Mais quelle effroyable panade.

Pimprenelle ! Ma pauvre chérie ! hurlait la comtesse. Dans quel état tu es ! Elle vient de se faire coiffer, est-ce que vous vous rendez compte ? Il va falloir couper, c’est sûr ! Mais qu’ai-je fait au Ciel pour écoper d’un peintre aussi maladroit ?

Tentant vainement de détacher les poils de son chien collés au papillon de taffetas noué entre les oreilles, elle lança à Scipion un regard de givre, alors qu’il récupérait son outil.

Vous savez pourquoi je ne vais que très rarement chez le coiffeur ? fit-il d’une voix lasse, qui n’attend plus de réponse : Parce que dès que j’en sors, il pleut, et il essuya ses pouces blancs contre sa salopette.

Dites, vous en avez encore pour combien de temps ? siffla-t-elle d’une voix au bord de la crise de nerfs.

Scipion jaugea les murs. Longtemps. Après quoi il émit un " umf " sceptique.

A vue de nez, douze. Douze jours. Douze bons jours. Disons : douze bons gros jours bien tassés. Voire treize, en comptant les raccords. Il y a toujours des raccords, pour des petites choses que l’on ne voit pas tout de suite. Une bulle. Une goutte. Une petite trace. Un poil de pinceau figé dans l’immensité blanche, car de même que l’homme perd ses cheveux, le pinceau peut aussi perdre ses poils. A chacun sa chute. C’est la vie. C’est inévitable. Il faut se résigner. Comptez treize jours avec les raccords, mais sans la marge. Or il faut prévoir une marge. Toujours. Personne n’est à l’abri d’un impondérable, les impondérables pullulent, ils grouillent, ils sont au-dessus de ma tête à échafauder d’ignobles stratagèmes, ils guettent le moindre de mes gestes. Par exemple, si je me cassais la jambe, là, à l’instant, ce serait un gros impondérable, d’où la nécessité de faire attention à la marge. Et il entama son ascension.

La comtesse eut un soupir excédé.

Bon, fit-elle en le voyant qui se remettait à l’ouvrage. Je vous rémunère et on fait sauter les aléas, la marge et toutes les mauvaises chutes. Qu’est ce que vous en dites ?

A ces mots, la main de Scipion se mit à trembler à la manière de ces pâtés de gelée verte que l’Anglais se fait une joie de servir bien fraîche à l’étranger qui débarque à Douvres après une traversée houleuse. Affirmant sa prise, il s’accrocha au pinceau de toutes ses forces ; il n’était pas question de le laisser échapper une deuxième fois.

J’en dis que je suis d’accord mais je crois aussi que j’ai besoin d’une petite pause, reconnut-il, le poing crispé autour du manche. La tête me tourne un peu, les objets me glissent des mains. Je vais m’occuper de votre chien, le temps de reprendre mon souffle. Bougez pas, me voilà.

Muni d’un torchon propre, il dilua des solutions transparentes dans une petite bouteille qu’il agita plusieurs fois, trempa un coin du tissu et se mit à frotter par petits gestes énergiques les poils du chihuahua mordeur, sous le regard sceptique de la comtesse.

 

Si le mot de panade recouvre une réalité mouvante, il désigne aussi une soupe très prisée dans les régions méridionales. En voici la recette qui semble avoir été inventée dans l’unique but de dynamiter l’expression " ça ne mange pas de pain ", parce que justement : pour une fois, ça en mange. 

* Tata tataaa ta ta taaaa ta ta tata taaaa….

Panade 

Préparation : 5 mn – Cuisson : 1h. 15

250 g. pain environ

20 g. sel

2 l. eau environ

1 dl. Lait ou crème

Mettre dans de l’eau froide des morceaux de pain rassis. Les laisser cuire une heure à petit feu. Ecraser complètement le pain pour donner au potage une consistance très lisse. Ajouter du lait, de la crème à volonté.

Il est impossible de déterminer exactement le poids du pain et la quantité de liquide, celle-ci variant avec l’espèce du pain et son degré de sécheresse. Si vous voulez obtenir une soupe épaisse n’hésitez pas à mettre du pain : plus il y en aura et plus ce sera épais. Si vous voulez une soupe légère, vous allongerez avec de l’eau. Si vous voulez une soupe pas trop épaisse mais pas trop liquide non plus, vous n’avez qu’à mettre un petit peu plus d’eau et un petit peu moins de pain, et si vous tenez vraiment à garder tout le monde à dormir, vous servirez votre panade avec des croûtons d’aïoli, sans oublier le Rosé.

à suivre…

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13 septembre 2007 4 13 /09 /septembre /2007 22:48



photo-mariage-libe.jpg






C’est une photo de mariage tout à fait solennelle, une image qui n’invite pas à la joie et encore moins à la légèreté, non, elle ferait plutôt venir les larmes, on pense à la Belle et la Bête, à King Kong, à Freaks, à Elephant Man, on entend sourdre Johnny got his gun et le masque d’horreur qui l’enveloppe, on se dit que ce mariage-là est autre chose qu’un cliché et que l’image du couple exposée donne à supputer la vie et la mort, ou tout au moins à immortaliser une possible résurrection après l’enfer.

Dès lors que l’on croit savoir pourquoi une photo a été prise on ne la regarde plus. Mais cesse-t-elle pour autant de nous parler ? Passé le choc de la révélation, elle se transforme et devient un objet de discours intérieur. Objet figuratif de répulsion, de désir, de remords, de nostalgie, l’effet produit est à entendre en premier lieu du côté fantasmatique. Un détail vient marquer l’œil, retenir l’attention, une autre image s’imprime dans l’esprit, se connecte à une autre image, développe une suite presque infinie de scènes déjà vues, révèle quelque chose de troublant dont on ne sait dire au juste ce que cela titille, bref on se demande si l’on a affaire à une image presque juste au sens où elle est prise dans une histoire ou juste une image qui provoque un ébranlement plus ou moins vif. On ferme les yeux et on se prend à penser l’Image, celle-là même qui vient nourrir l’Imaginaire. L’image du temps passé, du temps perdu, du vivant dépossédé de la vie, l’image des figures disparues, des êtres qui ont été là, qui ont compté et qui se sont imperceptiblement détachés. En faisant à la fois ressurgir de la chambre noire ce qui en a été pour l’autre dans un temps qui n’est plus et mettre à jour ce qui peut advenir pour soi, elle emplit de force la vue d’objets tendancieux et rend la pensée impossible ou au mieux contingente. Peu importe que l’image enchante ou désespère elle impose de ratifier ou de dénoncer ce qu’elle représente et opère du même coup une modification de l’humeur. La perception du monde et de sa propre image dans ce monde est alors entamée. On se débat toujours avec son image. L’image narcissique voudrait témoigner d’un espace privé absolument précieux, tout en s’offrant dans le même temps au regard de l’autre, forcément intraitable. Flattée ou mise en défaut, elle devient le produit d’une société et le masque révélé de sa propre histoire. Ce n’est qu’une fois comprise la nécessaire division entre un espace public et la sphère privée que la tension peut s’assagir, que l’embarras peut s’énoncer sans pour autant livrer l’intime. Sinon la photographie ne donnerait finalement rien d’autre à voir qu’un artifice d’où le sujet serait absent ou juste à le rendre visible que dans la négation de son désir. 

Photo de Nina Berman publiée en pleine page dans le journal Libération du 10 septembre 2007.

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11 septembre 2007 2 11 /09 /septembre /2007 19:31

Un petit bout d’histoire concocté sur une route du nord, la nuit, le temps d’un dépannage…

 

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Alors comme ça, vous avez été pris ? vous aussi ?

Comment ça pris ?

Pris, comme être pris, si vous êtes là, c’est que vous avez été pris !

Non désolé, je ne crois pas avoir été pris.

Mais bien sûr que si, je vous le répète, si vous êtes là, ici, dans ce lieu, maintenant, c’est que vous avez été pris.

Non, certainement pas.

C’est comme ça, va falloir vous y faire !

Franchement cela m’étonnerait.

Vous n’en revenez pas d’avoir été pris, c’est ça ?

Ah si l’on pouvait revenir de quoi que ce soit !

Vous ne paraissez pas comprendre ce que cela implique d’être pris.

Tout juste, je ne parais pas.

Si, vous le savez, seulement vous faites semblant, c’est ça vous faites semblant.

Ecoutez, je n’ai pas été pris et je ne fais semblant de rien, je suis entré pour voir et je me suis installé dans ce petit coin, là, juste dans ce petit coin ! mais rassurez-vous, je ne vais pas rester.

Bien sûr que vous n’y resterez pas au coin. Quand vous êtes pris, ils vous mettent toujours dans un coin au début. Faut comprendre que ce n’est qu’un point de départ.

Mais je n’ai pas été pris, je vous dis, pas le moins du monde !

Voilà, ils ont dû vous prendre pour ça, pour le moins du monde. Remarquez, cela ne m’étonne pas, ces derniers temps, ils ne s’intéressent qu’aux personnes délaissées. Vous êtes bien livré à vous-même n’est-ce pas ?

Non ! Enfin d’une certaine manière peut-être que je me retrouve à me débrouiller par moi-même, oui.

Ecoutez, les gens de votre espèce - les moins du monde - sont toujours seuls, c’est inévitable ! d’ailleurs, c’est certainement pour cette raison qu’ils vous ont pris.

Mais je n’ai pas été pris bon sang !

Allons, vous dites ça parce qu’ils vous ont mis au coin. Vous êtes tous les mêmes vous autres les moins du monde, faut toujours que vous vous racontiez des salades. C’est pourtant pas sorcier à comprendre, quand on est pris, on est pris !

Je ne suis pris dans rien vous entendez ? Je suis là dans ce petit coin, mais c’est tout, c’est en attendant.

Vous n’avez pas été pris, vous êtes là dans ce petit coin et ça serait tout ?

Oui.

Impossible !

Bon, n’en parlons plus.

Et comment seriez-vous arrivé ici, si par je ne sais quelle extraordinaire incongruité, vous n’aviez pas été pris ?

Je suis venu seul, de mon propre chef.

Ah, vous admettez au moins être seul !

Vous n’y êtes pas du tout, je suis accompagné.

Bien sûr, dans votre petit coin là, il n’y a pas de doute, vous êtes, comment dîtes-vous déjà, accompagné, c’est bien cela, accompagné ?

Je veux dire dehors. Dehors, je l’étais.

Vous voulez dire qu’ils vous ont pris dehors, c’est ça ?

Je ne veux rien dire du tout, rien !

Parce que cela change la donne, si vous avez été pris dehors, c’est que ceux du dedans ne sont plus à la hauteur, si vous voyez ce que je veux dire.

Non, je devrais voir quoi ?

Allons, ne me dites pas que vous ne voyez pas ce que nous voyons tous !

Mais quoi à la fin ?

Bon sang ! ceux qui sont pris et ceux qui ne le sont pas !

Si vous voulez bien laisser de côté le fait que j’aurais pu être pris, vous comprendriez que je ne suis rien d’autre qu’un type à qui il est arrivé une histoire comme il en arrive à tout le monde un jour ou l’autre.

Naturellement, comme nous tous ici, ni plus ni moins.

Non franchement dans mon cas, c’est encore plus bête que tout.

Si vous le dites !

C’est l’histoire de la panne en pleine nature, la nuit et pas âme qui vive aux alentours, vous savez comment ça se passe, on discute, on discute et à la fin tout le monde s’emporte. Sauf qu’à la fin de la fin, il y en a toujours un qui doit aller au charbon. Et dans cette histoire-là, c’est tombé sur moi.

Ah oui, c’est tombé sur vous ? comme ça…

D’accord, faut dire que je l’ai peut-être plus ouvert que les autres, alors c’est vrai que du coup ils m’ont dit d’y aller moi vu que j’avais l’air plus malin qu’eux. Bon là encore, la suite ne sort pas de l’ordinaire : je me suis mis à marcher, droit devant comme on dit, sans un regard derrière moi, j’avais dans l’idée que fatalement je finirais bien par trouver quelque chose, alors vous pensez bien que lorsque j’ai aperçu cette petite lumière, cette curieuse petite lumière qui n’en finissait pas de grandir à mesure que je m’en approchais et puis cette porte qui s’est ouverte tout d’un coup et cette drôle d’atmosphère à l’intérieur, oui alors je me suis dis que quand même j’étais assez malin pour ne pas me jeter là-dedans sans faire attention.

C’est ça, faites bien attention, faut éviter de faire le malin par ici.

Bah, c’est comme partout.

Non, ici c’est déterminant. Enfin, ça dépend de vos intentions.

Qu’est-ce que vous croyez ? le temps de trouver un dépannage et je file.

Un dépannage rien que cela ?

Je ne demande pas l’impossible que je sache.

Je n’ai encore jamais rien entendu de pareil.

Eh bien tant mieux si c’est une première.

Croyez-moi, vous feriez mieux de chercher à être désigné. Vous savez, être pris n’est que le début du parcours.

Je n’en sais rien du tout. Tout cela ça n’a rien à voir avec moi.

Ce n’est pas nous qui décidons de ces choses-là.

Mais quelles choses ?

Celles qui ont à voir avec nous. Les arrivées, les départs, l’ordre des choses quoi !

Bien alors disons que je suis sur le départ.

Vous savez bien que vous ne pouvez pas.

Comment ça ?

Vous venez tout juste d’être pris…

 




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6 septembre 2007 4 06 /09 /septembre /2007 13:26

noir-ecarlate-image.jpg


Trois personnages en quête d’absolu, deux hommes et une femme pris dans les tourments funestes de l’Histoire, trois extraits ici pour dire les déchirures et le désordre intérieur. Un roman tragiquement lumineux.

Sisco, homme de lettres, témoin engagé des maux du monde, devient scénariste pour tenter de se réapproprier un passé trouble et ranimer sa flamme combattante.
" Coller à son scénario lui donnait l’illusion de maîtriser le sens de l’aventure. Sa conception du cinéma était littéraire, il partait d’un constat, développait ses idées, les posait par écrit. Ses engagements politiques avaient été nourris des mêmes fondements, seulement les dogmes y remplaçaient la syntaxe, les principes les règles grammaticales, et les morts dans la marge des révolutions n’étaient que de regrettables contresens. "

Xerkés, cinéaste grec de renom, torturé et laissé pour mort sous la dictature des colonels, ancré dans le passé, il filme sans discontinuer la barbarie à l’oeuvre. 
" Le cinéma substitue à notre regard un monde qui s’accorde à nos désirs. Le désir dont parlait Rossellini n’est pas une histoire de plaisir, c’est l’incroyable privilège d’être témoin des instants où le paroxysme de la vie s’exprime, même si c’est dans le malheur. Quand je m’approche, caméra à l’épaule, de la détresse des faibles, à N’Djamena ou à Embrun, je ne la provoque pas, je décide de l’enregistrer, même si elle me renvoie à l’illisibilité du monde. "

Luciana, photographe, brisée par la dictature chilienne, son corps exposé à l’objectif ressasse l’épouvante et devient le lieu de l’expiation. 
" Le temps était un élastique de glu. Ressac d’images de lieux d’enfance, un bonheur intense mêlée à une totale douleur. Aucun mot dans aucune langue pour la crier, seule la démultiplication des reflets de miroir en miroir pour en témoigner. Moiteur de Santiago. Rires dans le jardin du dimanche. L’histoire du Chili, elle n’en sait rien, elle a treize ans. Par la fenêtre ouverte, les femmes de colonels qui la croient en train de jouer sur la balançoire lâchent un secret. Bébé, elle a été retirée à sa vrai mère, prisonnière politique vouée à la mort et donnée à ses parents. En une seconde l’impossible vérité la déchire en deux partie inégales, celle qui voudra à jamais la nier, celle qui ne le pourra pas. "

La chapelle des Apparences de Franck Pavloff aux Editions Albin Michel, 295 pages, 18,50 €

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2 septembre 2007 7 02 /09 /septembre /2007 19:41

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Une chronique à la petite semaine de quelques judicieuses fabriques de littérature.

à cliquer dans les Aiguillages :

 

Sur Mot Compte Double

Juste un petit texte, un peu inspiré par l'actualité, dit-elle. En quelques lignes Françoise Guérin nous interpelle sur la question de l’excitation et du transfert dans l’acte d’écrire. Pour qui sont ces pensées qui se donnent à lire, cet inconscient qui se raconte ? Entre destinataire incertain et lecteur inconnu quelle lettre fera signe en retour, par quel mot le lecteur se sentira-t-il atteint ?  ( Littérature, haut lieu de l'autre )

Sur Nouvelle au pluriel

La parution du recueil 2007 " Pour solde de tout compte " n’y est pas annoncée et pourtant il existe bel et bien, Gérard Levoyer a eu la gentillesse de me l’envoyer. Vous savez ce qu’il vous reste à faire…

Chez Emmanuelle Urien

Mes amis ont du talent. Ce n'est pas qu'une formule : allez voir, allez lire, vous verrez bien. " Vrai de vrai, Emmanuelle a de beaux et plaisants amis.

Sur Lenonsens, revue littéraire

La chronique d’Hector Plasma du numéro 41 : une lecture indispensable que vous soyez partis en vacances ou pas.

Sur Pour le plaisir d’écrire

La nuit, les tournesols s’affolent. Ernest J. Brooms profite de la nuit pour écrire des "Petites phrases" … mais pas seulement...

La dépêche expéditive de chez Reuters

Faire craquer une italienne serait tout à fait simple selon un sondage du magazine Capital : il suffirait d’être " au net " avec ses impôts. 71 % des femmes transalpines trouveraient follement sexy les hommes qui s’acquittent de leurs devoirs … envers le fisc.


Ces drôles de requêtes enregistrées sur la route Google / Calipso

Où écouter le cri de Tarzan ?

Pourquoi les personnes se grattent la gorge quand elles me rencontrent ?

Pourquoi les acariens déposent leurs œufs dans les replis chauds et humides de la peau ?

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