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24 novembre 2010 3 24 /11 /novembre /2010 08:00

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Comment bien foirer sa petite séance de bricolage

par Ysiad 

 

Nous poursuivons avec un enthousiasme non feint notre série selon laquelle " foirer, c’est bien, mais bien foirer, c’est mieux ", avec aujourd’hui une expérience que beaucoup de gens ont faite sans jamais oser s’en ouvrir à leur entourage, allons, ne niez pas, vous n’allez pas me faire croire que vous n’avez jamais essayé de vous prouver, à l’occasion des soldes, que vous n’étiez pas si mauvais bricoleur que ça !

 

 

 

Cette chronique s’adresse à toutes celles et ceux qui ne savent résister au chant suave du rayon soldé du bricolage d’un grand magasin. Tout commence donc par des soldes, un samedi de janvier, au Bazar de l’Hôtel de Ville (que nous appellerons plus simplement : BHV, pour pas avoir à tout retaper). Ah ! La prodigieuse attirance qu’exercent sur vous ces rayons où les perceuses ont perdu comme par magie 50% de leur prix en vingt-quatre heures, tout comme les scies sauteuses et les tournevis électriques dernier cri ! Et c’est pas fini, encolleuses à 80% de rabais, tondeuses trois vitesses à 70%, fers à souder, gratuits ou presque, et ça continue sur des kilomètres, y a qu’à suivre les belles étiquettes rouges le long des rayonnages, tout est en solde ! (vendeurs exceptés). Au fait, de quoi avez-vous besoin, au juste ? De trois fois rien. De cadres, pour y glisser des posters de Marilyn Monroe récemment acquis pour la chambre de votre fille, et de crochets X pour les fixer au mur. C’est tout. Restons-en là, d’autant que le vendeur du BH(V), vous voyant venir, vous a fourgué les cadres les moins chers, aux mesures qu’il vous faut et à prix estourbis, en vous prévenant tout de même que la glace était très mince. D’où leur décote. Pour les accrocher, vous avez acquis un lot de crochets X dorés de toutes tailles, c’est parfait, retour à la maison pour une inspection en règle de la boîte à outils. Le marteau est là qui vous attend, et là aussi la colle, et les allumettes si ça veut pas tenir du premier coup, vous bricolez souvent avec le secours des allumettes, ça peut s’avérer utile pour fixer l’objet récalcitrant.

Commencez par déballer la marchandise en découpant avec la lame d’un couteau les gros rubans de scotch brun que le vendeur du B(HV) a ficelés dans un excès de zèle autour du paquet. Le bazar résiste, c’est agaçant. Très. Vraiment. Il vous faut indéniablement une bonne paire de ciseaux pour venir à bout de l’empaquetage, et non un couteau nul qui ne coupe pas. Ouvrez les tiroirs de la cuisine, rien. Mais où sont passés les ciseaaaaux ? Personne n’a vu les ciseaux dans cette baraque, ça fait un moment qu’ils ont disparu, tout disparaît chez vous, c’est une manie. Au bout d’un quart d’heure de recherche frénétique, tirez d’un geste sec le petit meuble où votre conjoint planque son foutoir, derrière lequel ont glissé douze paires de ciseaux de cuisine. C’était donc ça ! Tous les ciseaux que vous avez cherchés durant des jours sont là, nichés dans la poussière ! On ne dira jamais assez les bienfaits d’une bonne recherche. Prenez la première paire qui vous tend ses lames, soufflez dessus, coupez net ce gros scotch ridicule et superfétatoire, puis dégagez les cadres l’un après l’autre de leur gangue de scotch, nom d’une pipe en bois, déchirez aussi le film qui les emballe, déchirez tout, jusqu’à ce que vous en teniez un. Enfin. Raaaah. Jouissif. C’est beau, un cadre, le jour (la nuit, moins). Choisissez un joli crochet X, et en avant, marteau en main, à l’assaut de ce mur que vous mesurez au préalable avec le mètre, pour bien centrer l’affiche, on n’est pas des amateurs, quoi. Un petit coup de crayon à droite, un autre à gauche, trois bons gros coups dans le mur, pour fixer le crochet X. Là. Parfait. Ça tient, pas besoin d’allumettes. Bon, très bon début. Excellent. Maintenant glissez l’affiche entre le verre et le carton, attention, c’est délicat, disposez la bien droite, nous y sommes, puis replacez le carton dans la rainure du cadre et rabattez les douze bitonios pour faire tenir l’ensemble, vous savez, ces p’tits trucs de fer fixés autour du cadre. Flûte. Y en a un qui s’est cassé net, et un autre. Du p’tit solide. De la p’tite merdouille. D’où l’intérêt d’avoir un bon morceau d’allumette à coincer sous la glace, ça remplace très bien ces imbéciles de bitonios à la con. Maintenant, tenez le cadre à deux mains tout en cherchant à accrocher sa suspension au crochet X la tête à ras du mur, c’est quoi, cette suspension bizarre, on dirait une mâchoire de crocodile, elle n’est pas assez large, elle veut pas s’accrocher, elle sert à rien, c’est naze, ce truc. Il faut recommencer. Recommencer encore. Toujours, recommencer. Au bout du vingtième essai, vous exercez sans vous en rendre compte une pression telle sur la glace que celle-ci se fend sur vingt centimètres, puis s’étoile, puis se brise complètement entre vos mains, il y a du verre partout sur le sol.

 

Vous enragez ? Allons. Vous n’êtes pas au bout de votre foirade, un peu de courage, il reste trois cadres à accrocher.

Prenez un autre cadre et recommencez la manœuvre. Cette fois-ci, le cadre n’est pas de bonne qualité et tous les bitonios se pètent à mesure que vous les rabattez sur le carton. Quant au troisième cadre, après avoir glissé l’affiche entre le verre et le carton et rabattu sans les casser tous les bitonios, vous constatez en le retournant l’absence de suspension. Ah. Y a comme qui dirait un souci. Un gros souci. Un gros souci de chez gros souci, pour être encore plus clair. Saloperie de défaut de fabrication, saloperie de produit made in China, saloperie de saloperie!

Les affiches de Marilyn attendent sur le lit, au milieu du verre brisé. L’après-midi s’est volatilisée, il est presque dix-neuf heures.

Bravo. Dans le mille. C’est foiré.

Mais si par miracle, en plongeant dans la poubelle, vous retrouvez entre les carcasses de crevettes et les yaourts poisseux le ticket de caisse indiquant que le matériel en solde n’est ni repris (tralali) ni échangé (tralalé), alors seulement, votre petite séance de bricolage sera bien foirée.

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commentaires

Y
<br /> <br /> Merci Sylvette. Les acquéreurs de bateaux disent souvent que les deux plus beaux jours de leur vie sont le jour où ils ont acheté leur bateau et le jour où ils l'ont vendu.<br /> <br /> <br /> C'est pas encore dans nos projets, le petit voilier le nez au vent. Mais bon. Attendons la retraite...<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Bravo Ysiad, que c'est drôle!<br /> <br /> <br /> C'est très important d'avoir des outils de bricolage dans un placard fermé, un peu comme un bateau au ponton, une moto en pièces détachées ou une paire de palmes au grenier: on sait qu'un jour,<br /> peut-être , si on le décide, on pourra fabriquer quelque chose, naviguer , rouler cheveux au vent, plonger...Et c'est important d'avoir des rêves. En plus une perceuse dans un placard, c'est<br /> beaucoup moins cher qu'un bateau au ponton...<br /> <br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> Je voudrais bien avoir accès à cette boîte à outils, encore faudrait-il que j'arrive à l'extraire du petit placard où sont entassés d'autres outils au milieu d'un très grand fourbi. Et je crois<br /> aussi que justement, parce que ce n'est pas du tout son domaine, il faut qu'il le maîtrise absolument, nom d'un p'tit Platon et d'un p'tit Socrate. Ces jours-là, je prépare des pansements et des<br /> bandes Velpeau.<br /> <br /> <br /> Ah, quel bonheur d'avoir un mari bricoleur !!!<br /> <br /> <br /> Merci Jean. Tu es très perspicace!<br /> <br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> "Mon dieu quel bonheur, mon dieu quel bonheur d'avoir un mari qui bricole..." comme chantait Colette Renard, je crois. Mais peut-être qu'Hervé, bourré de talents, n'a pas celui-là, et qu'il t'a<br /> laissée te débrouiller avec sa boîte à outils, pi pon, pi pon, boîte à outils pi pon...<br /> <br /> <br /> En tout cas une texte croustillant basé sur du vécu. Encore, encore !<br /> <br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> Je voudrais remercier Patrick pour les illustrations qu'il trouve et les titres savoureux.<br /> <br /> <br /> Un grand merci à tous pour vos commentaires sympathiques.<br /> <br /> <br /> Annick, je vais suggérer les punaises à mon conjoint qui n'arrête pas de compléter sa boîte à outils. Rien de tel qu'une bonne punaise bien naze pour vous bousiller un coin d'affiche.<br /> <br /> <br /> <br />
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