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17 janvier 2009 6 17 /01 /janvier /2009 10:31

Pendant un quart de siècle Ana Surret a écrit pour diverses rubriques d'un quotidien régional. Pour elle, il s'agissait de rendre compte, comme témoin, de la vie des autres, de mettre en lumière des situations, des événements, voir se susciter des réactions à ses écrits. Elle a été une "correspondante locale de presse", nom pudique des gens dont on apprécie la collaboration, mais que l'on se refuse d'intégrer comme professionnels.

Aujourd’hui, elle cultive l’écriture sous d’autres formes et d’autres cieux. De passage au café, elle nous a confié cette lettre où il est question du bon usage de la liberté comme principe de résistance aux idées reçues…

 

Ana à Juliette, salut

 

A quoi bon tourner autour du pot, ne vaut-il pas mieux entrer dan le vif du sujet ? C’est d’une certaine manière s’ouvrir la porte de la liberté. Liberté dont je veux t’entretenir puisque tu me dis te sentir enfermée. Certes ce terme de liberté est une notion abstraite et pourtant elle se traduit par des éléments palpables. Mais pour jouir de cette liberté sous la forme du bien propre à chacun, qui peut se trouver très éloignée de l’idée de liberté lorsque celle-ci concerne un groupe, une masse de gens, voire une population toute entière, il faut avoir conscience de son existence.

J’affirme donc que pour jouir de cette liberté dont je veux te parler, il faut tout d’abord que tu définisses, pour bien le connaître et être en mesure de le neutraliser et même de t’en débarrasser, ce sentiment d’enfermement. Du moment qu’il ne s’agit pas d’un empêchement physique à te mouvoir ici et là, cet enferment relève de barrières mentales installées par toi-même, par des évènements ou des influences extérieures, sans que tu en aies eu conscience.

La clef ouvrant la porte sur la liberté n’est pas inaccessible, bien au contraire, ce malgré le sentiment néfaste qui t’habite.

Le fait que tu te sois ouverte à moi est porteur d’espoir et confirme que tu es déjà sur le chemin qui te mènera à cette liberté à laquelle tu aspires ; car cette démarche même, procède de la liberté. En venant vers moi, tu as franchi un obstacle qui te contraignait, tu a donc fait acte de liberté, même si pour toi cette démarche ressemblait plus à une bouée jetée à la mer qu’à cette notion de libre arbitre dont chaque être est investi à sa naissance.

Sache néanmoins que cette liberté est fragile, qu’elle doit être protégée de beaucoup d’ennemis et qu’il est nécessaire que sa flamme soit sans cesse entretenue.

Les règles de la vie en société sont parfois des entraves mais ne représentent que rarement un empêchement à l’exercice de cette liberté. Je ne parle pas bien sûr de situations extrêmes que sont les guerres et les affrontements armés ou non, où la vie d’être humains est en jeu.

Non je me place à l’échelle de la vie ordinaire, celle de " métro, boulot, dodo " qui, à première vue, n’est en rien réjouissante. Même dans ce cas de figure, la liberté dont je te parle existe et le savoir, en user, rend heureux. Et le bonheur est le plus sûr rempart pour sauvegarder sa liberté intime et se protéger de tout enfermement.

Pour atteindre cette félicité, cette jouissance, il ne faut pas brûler les étapes, il faut procéder part petites touches, se contenter d’avancées modestes, car chaque pas fait sur ce chemin doit s’accompagner de la perception aigüe de ce que tu viens de gagner.

Je reprends : métro, boulot, dodo ", derrière cette expression ne réside que peu d’espoir de plaisir, élément forcément associé à la liberté. Pourtant si j’incise entre métro et boulot et insère un élément étranger, par exemple une lecture, non pas de la une des journaux qui, en ce temps de crise générerait plutôt de l’angoisse, mais de quelques auteurs, voire de philosophes anciens, voilà que s’entrouvre une porte vers la liberté. Les mots d’un autre t’interpellent et dans ton esprit, sans contraintes, d’autres mots, des idées se forment. Rien ni personne ne peut les combattre, ils t’appartiennent, font corps avec ton esprit. Toi seule a le pouvoir de les accepter ou de les refuser, c’est l’un des champs de liberté dont tu disposes.

Et cet espace, il faut que tu en savoures l’existence. Nourrie de ce nectar renouvelé à l’envi par l’absorption de nourritures variées constituées de lectures, mais aussi de l’écoute des autres, ton territoire intime de liberté va s’agrandir, devenir plus fertile. Croîtront alors ta sagacité, ton esprit d’analyse, de synthèse, et ta personnalité s’affirmera loin des carcans imposés par ceux qui sèment les " idées reçues ", les " il faut penser ceci ou cela ". La liberté t’habitera.

Mais prend garde qu’elle ne déborde sur le voisin qui lui se retrouverait dans la situation d’enfermement dont tu tentes de sortir.

Porte-toi bien

Ana Surret

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commentaires

L
Oui, prends garde "ma liberté s'arrête là où commence celle des autres". J'aime bien ton texte Ana !Quant à vous, LamyJacques, votre poème sucite plein d'émotions et comme toujours, c'est beau !
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L
Eh oui, Ana SURRET, lorsque l'enfermement n'est pas physique, la Liberté et la Paix sont intérieures. Mais que de sentiers raboteux à parcourir, que d'épineux à écarter avant de comprendre cela....Bravo et merci à vous Ana SURRET !...<br /> ÉVASION..Les murs de ma celluleDe rêves, de dessins, et dates sont noircis :Vole une libelluleAu champ de mes espoirs et songes indécis...Et chaque pierre cèleLa clameur du ressac de vastes océans.Ma chaîne se descelle :Je m'envole et rejoins alors les goélands....Du guichet j'entrevoisLes plages de l'été, la neigeuse montagne ;J'entends chants de hautbois,Fifres du Lubéron, binious de Bretagne...Je trace des bâtonsAlignés sur le mur : je décompte mes rêvesQue le pas des matonsBrise, en triste retour aux réalités brèves....J'entends de la paillasse,En ma tête jaser un tout petit ruisseau.J'enduis cette caillasseDe salpêtre, au mur gris pour graver l'arbrisseau....Par l'étroite ouverturePrés d'un coin de ciel bleu, juste entre les barreaux,J'observe l'aventure,Sempiternel amour, de quelques tourtereaux....Dame Nature en fête ?La reverrai-je un jour ? Ivresse du matin,J'entends suivre ma quête.Je me ris des barreaux et subis mon destin..Seul au sombre silence,J'entrouve ma chemise avec fébrilité,Fouillant ce coeur en transeOù se loge, tapie au fond. Ma liberté !.<br /> .Jacques LAMY
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M
J'applaudis des deux mains! Merci! Martine également CLP
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